• La culture du don

    La culture du don-

     

    Arrivés  au moment où l’obscurité commençait à recouvrir le paysage, nous n’avons pas trop pu identifier l’endroit où nous débarquions après 8 heures de route. A peine descendus du véhicule, nous avons été entourés d’adultes et d’enfants qui se sont empressés de prendre une partie de nos bagages.

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    Après une courte marche à pied, nous sommes arrivés chez nos hôtes. Les intérieurs ladakhis sont froids par la température et chauds par les matières et les couleurs. Les murs recouverts d’enduits colorés bleus, mauves, verts, les foyers autour desquels tout le monde se presse, les tapis de couleur qui recouvrent les sols, les couvertures bariolées recouvrant les banquettes sur lesquelles on s’asseoit à même le sol, la vaisselle en métal cuivré, les thermos fleuris tout est un plaisir pour l’œil.

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    Nous sommes accueillis avec beaucoup de chaleur, le thé est servi puis le repas. Les sourires illuminent les visages, on est parfois séparés par la barrière de la langue mais on communique avec le cœur. Je me réjouis que mes filles m’accompagnent dans ce voyage. A 13 et 16 ans, elles sont en train de vivre une expérience essentielle qui leur apprend le monde bien mieux qu’aucune école ne saurait le faire. Rien  ne les rebute : ni le froid, ni la précarité des conditions de séjour, elles  s’émerveillent de tout, goûtent à tout, du thé au beurre de yack au chang, la boisson fermentée que l’on va nous servir régulièrement dans nos visites aux familles. Durant la célébration du losar.

     

    L’après midi, profitant du soleil généreux, je suis allée dessiner un peu à l’écart de maison, sous le tertre des offrandes.  Punchok, la sœur de Samphel, est tout de suite venue s’asseoir à côté de moi, elle me parle de manière animée mais je ne comprends pas, ce qui la fait rire. Elle observe attentivement mon  croquis au fusain et s’exclame dès qu’elle reconnaît un élément du paysage.

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    Puis les plus jeunes arrivent de l’école, immédiatement elles nous rejoignent et se mettent aussi à commenter le dessin en cours avec beaucoup de gaieté.

    Je leur montre des éléments du dessin et elles me donnent la traduction ladakhie, je constitue alors un lexique approximatif qui me permet de dire quelques mots dans leur langue.

     

    Depuis notre arrivés, nous avons été invités à plusieurs endroits et partout nous sommes reçus avec la même hospitalité et la même bienveillance : il n’y a pas de doute, ils sont heureux de nous voir venus d’aussi loin pour partager le losar avec eux, ils sont heureux de notre présence dans leur maison, à leur table, dans leur village et en témoignent  de manière très spontanée et simple.

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    Quelle différence, me fait remarquer ma fille aînée qui à 16 an passés fait son entrée dans le monde, avec la vie sociale en France, où finalement on croise beaucoup de monde en pouvant pendant très longtemps ne rencontrer personne.  Dans notre culture de la performance et de l’individu, la rencontre est devenue problématique, on s’intéresse  surtout à soi, puis à ce qu’on peut obtenir de l’autre en terme de  profit de quelque nature que ce soit, mais rencontrer l’autre dans son altérité, dans son rapport au monde, dans ce qui constitue son être, ça c’est une autre histoire. Ca demande des efforts, de l’écoute, du temps et surtout cela demande une forme de générosité qui ne vient que du cœur.

     

    Est-ce qu’on imaginerait recevoir des inconnus venus de l’autre bout du monde, ne parlant même pas notre langue, ayant d’autres habitudes alimentaires et vestimentaires éloignés des nôtres, dans notre maison, en se souciant à ce point là, de leur bien être, de leur confort et en partageant le meilleur de ce que l’on a avec eux ?

    La culture du don-

     

    Cela parait peut-être naïf ou utopique, pourtant la culture du don existe réellement et constitue même le fondement de certaines cultures, comme celle des indiens Haïdas, sur la côte ouest du Canada par exemple,  où les relations sociales sont étayées par le potlach ou give  away, qui est une cérémonie du don : la valeur de la personne est estimée à sa capacité à donner et les leaders sont désignés en fonction de cela. Ce qui après tout fait parfaitement sens, car guider une communauté, c’est d’abord la servir donc être capable de donner le meilleur de soi.

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  • Commentaires

    1
    C.M
    Vendredi 10 Décembre 2010 à 18:46

    c'est une maison d'édition qu'il faut monter...Bravo pour ces récits, on a beaucoup de chance de pouvoir te lire

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